Lorsqu’une partie décide de résilier, de manière anticipée, son contrat à durée déterminée, c’est à ses risques et périls. Si la résiliation est jugée abusive, le cocontractant qui la subit est fondé à obtenir l’indemnisation de son préjudice résultant de la privation des gains qu’il était en droit d’espérer, jusqu’à l’expiration du contrat.
C’est précisément ce à quoi s’est exposé un franchisé d’un réseau de services aux séniors. Après avoir rencontré des difficultés dans la gestion de son agence, celui-ci a notifié à son franchiseur sa décision de résilier son contrat, avec effet immédiat. En réponse, l’enseigne a réclamé à son franchisé plus de 200.000 euros, en application de la clause pénale figurant au contrat de franchise, et à défaut d’exécution, l’a assigné devant le Tribunal de commerce de Paris, avec succès.
La Cour d’appel de Paris, saisie de l’appel interjeté par le franchisé, devait ainsi rechercher si le comportement du franchiseur était suffisamment grave pour justifier que le franchisé y mette fin.
Selon le franchisé, le franchiseur aurait manqué à ses obligations relatives à la délivrance d’un savoir-faire et à son devoir d’assistance. Il lui reproche notamment de ne pas l’avoir soutenu lorsqu’il a rencontré des difficultés avec l’un des fournisseurs référencés du réseau.
Le franchisé invoque également une perte de confiance à l’égard de son franchiseur, lequel a fait procéder à la fermeture d’un certain nombre d’agences et semblait exposé à certaines difficultés financières.
Toutefois, ces arguments n’ont pas convaincu la Cour d’appel, considérant que les manquements allégués par le franchisé n’étaient pas de nature à justifier la résiliation du contrat de franchise.
La Cour relève que l’enseigne de services aux personnes avait respecté ses engagements et veillé au bon approvisionnement de son franchisé, dès lors que celui-ci ne faisait pas état de difficultés d’approvisionnement après son changement de fournisseur, et qu’il ne rapportait pas la preuve, en tout état de cause, de ses difficultés.
Par ailleurs, la Cour d’appel constate que le contrat de franchise ne contenait aucune obligation à la charge du franchiseur de maintenir ou développer le réseau, de sorte que la diminution du nombre des agences n’est pas fautive en soi, le franchisé ne démontrant pas, au surplus, qu’il en serait résulté une atteinte à l’image de la marque. Les juges font également fi de l’argument tiré des craintes du franchisé sur la santé financière de son franchiseur.
En conséquence, le franchisé, coupable d’une rupture fautive de son contrat, est condamné à indemniser son franchiseur. Néanmoins, il obtient une réduction du montant de la clause pénale, jugée excessive : la Cour évalue à la somme de 30.000 euros le montant de l’indemnité due au franchiseur.
Qu’elle soit franchisée ou franchiseur, la partie qui souhaite rompre unilatéralement son contrat, en dehors de l’intervention du juge, et parfois en l’absence d’une mise en demeure préalable, devra se réserver la preuve des manquements particulièrement graves commis par son partenaire, et non de simples inexécutions contractuelles.
Si ces précautions sont incontournables, il n’en demeure pas moins qu’une réelle incertitude pèse sur la qualification du comportement grave, chaque situation étant appréciée, au cas par cas, par les juges.
Cour d’appel de Paris, 3 octobre 2018, n°16/05817
Par :
Me Fanny ROY
Avocat associé, Spécialiste Franchise & Réseaux
PIOT-MOUNY & ROY Avocats, Lyon
fanny.roy@piotroyavocats.com
www.piotroyavocats.com
Le cabinet Piot-Mouny & Roy est aujourd'hui l'un des tout premiers cabinets d'avocats lyonnais spécialisé en droit de la franchise.
Il intervient notamment auprès des franchiseurs, des réseaux de distribution, et des franchisés, tant en conseil, que pour une gestion efficace des litiges.
Le cabinet a développé une expertise reconnue qui lui permet d’intervenir auprès de ses clients, à tous les stades de leurs relations commerciales : négociation et rédaction de tous contrats commerciaux, et notamment de franchise, Document d’Information Précontractuel, mise en place de Master Franchise, Concurrence déloyale, rupture brutale d’une relation commerciale et pratiques discriminatoires.
Grâce à sa pratique des procédures litigieuses, le cabinet prend en charge la totalité du contentieux et accompagne ses clients jusqu’à l’audience de plaidoirie, et l’exécution effective des décisions de justice obtenues. »
Copyright 2024 Hello franchise est une marque déposée. Toute reproduction est interdite - Contactez Hello Franchise
Commentaires
Laissez un commentaire